Chat endormi par ce livre posé devant moi, dans la contemplation stagnante entre deux pages d'une lecture pas si passionnante, j'avais relevé ma tête, j'avais alors aperçu cette opulence contrainte dans ce trench cintré par une ceinture nouée à la taille. Un excès de beauté enveloppé dans ce manteau trois-quart, idéal pour le printemps, mais trop court aujourd'hui avec ce vent et cette pluie fine, un regain de giboulées de mars déporté dans le calendrier, elle était courbée sous son parapluie, son sac à main dans le pli de son autre bras.
Elle forçait ce couloir de vent, cette rue commerçante devenue déserte après cette baisse soudaine de température. Des couleurs vives, des bas nylon aux revers acidulés dans la boutique de lingerie, des tuniques en laine fine pour le futur été, des escarpins aux brides rouges, jaunes ou oranges dans d'autres vitrines, le soleil manquait, mais elle avait rendez-vous important ou amoureux pour être là. Je ne savais pas, moi cloîtré dans mon café, derrière ma vitre avec un théière chaude, des parfums de bergamote et de fleurs de cerisier, je la suivais des yeux, captivé par tant de beauté en courbes. La marche plus rapide pour lutter contre le souffle impétueux de la bise, sa poitrine s'affolait, voulait respirer. Au gré d'une bourrasque, elle s'est libérée, devenant visible avec le décolleté plus ouvert. Des seins à découvert, sans être nus, juste suggérés à mon regard voyeur mais esthète. Rondeurs réelles, de chair et de féminité, de pulpeux arrondis dans les trois axes de l'espace, vérité de son corps de rondeurs, elle était si belle ainsi.
Aucune volonté d'exhibition de sa part, ni même d'affirmation détournée de sa richesse excessive de courbes, elle était femme depuis toujours avec ses plus, ses bonus charnels ici ou là, sur sa taille et ailleurs. Gourmandises artistiques, cuisses galbées vers des hanches fières, bonheurs exessifs aux yeux des sylphides créatures quasi anorexiques aux tristes visages remodelés, elle était cette silhouette glamour. Souvent moulée dans une jupe crayon, comme aujourd'hui, variant les couleurs et les basiques. Ses hanches ondulaient, flattaient les yeux extérieurs, ses tops et ses chemisiers embrassaient sa poitrine. Mais pourquoi renoncer à être celle qui avaient des courbes quand chaque jour elle recevait des bras d'amour autour d'elle, quand elle se regardait avec bonheur dans le miroir. Décalée des standards, elle en doutait, surtout elle doutait de leur normalité définie par des stylistes fades, des publicités érronées et factices.
Son corps s'exprimait, parfois débordait, elle respirait, tout simplement.
Alors ce matin quand elle avait choisi ce corset, cette lingerie délicatement serrée, tendue brins après brins dans son dos, les cordons dans les oeillets, les noeuds, la respiration, elle avait mesuré le plaisir de prendre ce temps-là. Infiniment femme en soulignant sa taille, elle marquait son allure, avec de jolis bas en plus sou cette jupe gris souris, dans ses hauts talons fins. Moderne avec des accessoires glamour !
Nylonement