Lundi de Pâques, entre mots et pensées diverses, je regarde le jardin sombrer sous les coups de vent, le froid du mois d'avril montre sa force. Inutile de lutter contre lui, je ne me trouve pas le début d'une envie de sortir dehors, dans mon jardin pourtant fleuri. Les glycines laissent leurs grappes se déhancher dans un pogo affolé. Mon livre attend sur la table basse, je joins mes maisn autour de ma grosse tasse de thé chaud. Un parfum de réglisse entêtant se dégage, pousse les autres arômes derrière lui, il s'impose à moi. Un bonbon olfactif, mais je me penche vers des chocolats noirs aa zeste confit de pamplemousse rose, une autre gourmandise. Je souris de ces petits bonheurs. Fugaces mais intenses.
Dans le fauteuil, devant moi, lui sommeille, son livre encore entre les mains, la tête bloquée par un coussin doux, il est parti dans ses rêves sans doute. Avec de belles élégantes très probablement. Parfois il sourit, son regard intérieur scrute leurs silhouettes, s'amuse des détails innocents et vulgaires des unes, des accessoires chics des autres. Les mots l'ont assommé, il respire calmement, médite peut-être aussi les siens. Ecrire est souvent son passe-temps de fin de week-end. Mais celui-ci est prolongé, alors il aura un peu plus de mots en réserve, une vague de plus pour son imagination. Voir, contempler, observer, déguster les courbes, comprendre les féminités, revoir son jugement pour deux femmes du même âge avec des tenues différentes, la mode est son menu quotidien, toujours renouvelé. Toutefois, il ne fait que savourer les effluves visibles avec tant de variations. Moqueur il aperçoit le contraste entre les tendances des magazines de mode et la réalité, la vraie mode. Son livre bouge, glisse et finit par tomber sur sa cuisse. Sa main, ses longs doigts libres attendent la petite musique des futures pages. Pianoter en dormant, il prépare la première phrase, les volutes de soie, les bottes des unes, les escarpins des autres, les émotions emballées par les coups de coeur, les larmes et les rires.
Durant sa sieste, je me suis changée pour nourrir son gourmandise de mode. Je sais que son regard me suit toujours, devant, derrière, dès le réveil, nue ou presque habillée, il me couvre de baisers voyeurs. Ses bras savent aussi glisser des mots autour de moi, car il aime tant voir mon corps s'envelopper de douceur, mais surtout, il aime traduire mon caractère, mon humeur à travers ma tenue. Mes choix de jupes, de robes, de tops ou de chemisiers, l'intensité de mon maquillage, mes cheveux tirés ou libres, il hume tout cela, mon parfum en bonus. Il me déguste unique et aime tout autant les incarnations multiples de mon style.
Naturellement, je suis sure qu'il verra en quelques secondes ce détail, glissant son premier regard à peine éveillé de mes pieds vers ma taille, de mes mains vers mes yeux. Le verrez-vous ?
Nylonement