Lire est un acte de liberté, comme écrire l'est aussi. L'un est la source de vie de l'autre, même si certains écrivent pour ne pas toujours être lu, mais pour dilapider des mots avec des émotions fortes qu'ils libèrent. Un acte de vérité avec un miroir trouble, les cahiers d'écolier reçoivent les lignes pleines, les ratures et les pages blanches des jours trop chargés de doutes. D'autres prennent les écrits des autres pour en faire leur discours, non sans voler les phrases et les citations à un nègre tapi dans l'ombre. Point de livres à l'horizon mais un jeu de demandes de dernière minute, de corrections improbables, de rendez-vous manqués avec les hôtes de l'autre côté du micro, sans oublier les félicitations impossibles, les envolées lyriques inutiles pour des assemblées endormies par un déjeuner trop lourd. Parfois aussi des énigmes glissées entre deux paragraphes, des interrogations pour celui qui découvre trop tard un mot manquant, une question ouverte où il faudra répondre dans une improvisation non calculée.
L'auteur a été le nègre d'un président, l'homme des petites phrases choisies avec soin pour un homme lettré qui se rêvait plutôt écrivain que politique. Il aurait dû laisser son siège de pouvoir pour ne nourrir que son égo et les piles d'invendus. L'auteur donc a livré des tonnes de discours, tout étant enfermé dans le coffre-fort d'un palais présidentiel ou royal. Il se joue de ces situations de pouvoir, de ces jeux de jambes en l'air, des conseillers zélés et autres courtisans.
Amour, peut-être, entre les lignes là aussi.
Un livre divertissant avec le style toujours très vivant et parfois sarcastique d'Erik ORSENNA.
GRAND AMOUR
d'Erik ORSENNA