Un jour j'ai cru que le monde s'écroulait. Ce matin là, je n'avais plus de forces, plus rien en moi, en quelques instants, une fuite sans fin.. Toute l'énergie avait glissé en dehors de ce corps, évaporé en touchant le sol, le trottoir et son macadam froid. Plus de saison, juste un vent gelé sur moi, des personnes affolées, mon visage tout blanc, mes yeux ouverts vers le ciel gris, je n'étais plus présente.
Quelques minutes, quelques longues minutes, un temps sans fin pour non pas comprendre ce qui ce passait, mais simplement revenir vers moi, avaler ma salive et respirer. Tout s'était arrêté, je n'avais plus de repères, tout apparaissait comme plat, en deux dimensions, écrasé sur le sol, une vision tout autre de la vie, des gens, des mouvements, avant que n'arrive les pompiers, leur médecin, leurs gestes prévenants.
Je me sentais si bien en partant, mon homme encore endormi, son parfum se mêlant au mien, mon tailleur, un joli motif sur mes jabes et mes bottes. Vers mon nouveau poste, avec une belle envie, ce projet, cette dynamique avec toute mon équipe, nous bossions tous ensemble depuis plusieurs semaines pour cet objectif commun. Mais là, soudainement, sans raison, je n'ai plus rien ressenti, j'ai quitté cet espace, encore endolorie par ma chute molle, encore ballotée dans cette ambulance, des mots que je ne comprends pas, des lumières, un second décrochement.
Tout est allé très vite sans que je le saches, sans que je le vois, avec cette impression d'être une spectatrice endormie ou avuegle face à moi-même. D'autres lumières, d'autres lieux, des roulettes, des portes, des mots encore, des médecins, un silence total de ma part, j'étais là et ailleurs à la fois.
Un seul rêve, un pull tunique chaud pour m'enrouler dedans.
Quand je me réveillée, ils m'ont donné leur diagnostic, expliquant leurs interventions ainsi que les tubes et autres machineries qui m'entouraient. Je me souvient de mon tailleur gris, nickel sauf la jupe tâché, froissée, suspendue à un cintre sur la poignée d'une armoire bleu pastel. Et lui, qui avec des yeux grands ouverts, pleins d'amour et de peu, il est entré, sagement pour aller vers moi. Enfin ces mots fûrent les premiers que mon cerveau a voulu comprendre, entendre surtout. Une clef dans cette parenthèse imprévue de ma vie de femme.
Nylonement