Chaleur de l'après-midi, vent sournois qui soulève les jupes et rappelle que l'été est encore loin.
Je pousse une table, je me glisse sur une chaise, là sur cette terrasse de café, je commande un schweppes citron. Contemplative, naturellement, je pose mon téléphone, je l'oublie même car le silence malgré la centaine de CV envoyés la semaine dernière, m'agace et me terrifie.
Sobrement, je laisse mon regard voguer sur la population, je flâne avec mes yeux, immobile, cherchant le détail de mode des unes, les silhouettes des autres. Homme ou femme, je ne suis bégueule, tout est sujet à mon plaisir visuel. Un décolleté savant d'une chemise en coton ancien, caché par une écharpe de coton mou indien, une coiffure courte qui va si bien avec le sourire de la demoiselle, deux amoureux plus loin, lui n'ose pas, elle parle. Enfin ils s'arrêtent, lui ose, les lèvres se rencontrent, elle l'enlace, n'attendant que cela peut-être. Lui là-bas avec son téléphone, une veste d'été sur l'épaule, une chemise un peu vieillotte, un pantalon droit, mais une paire de fesses bien rondes, un bonheur visuel. Non je ne regarde plus ailleurs, j'attends juste de trouver le zoom pour apprécier la courbe parfaite, pourtant le visage est quelconque, je préfère définitivement le verso.
Une robe bleu, une robe noire et beige, deux collègues ou deux copines, elles parlent avancent vite dans la rue, rien devant elle. Un couple de personnes âgées, une course folle entre lui et sa jambe raide et madame un peu ronde, pas très habile pour escalader les trottoirs, ils se faufilent entre poubelles, voitures mal garées, arbres stressés par le goudron ambiant et quelques crottes de chien impolis, enfin surtout leurs maîtres. Un groupe de jeunes fument, ils causent et tapotent leurs téléphones, cet organe bientôt greffé sur eux en direct. Des jeans uniquement !
Là-bas un skateur, les cheveux au vent, l'allure du surfeur cherchant sa vague, précoce avec son short et son tee-shirt débraillé. Je bois mon verre, j'ouvre mon magazine en attendant le prochain rendez-vous. Des publicités, des gens parfaits, des jeunes filles plutôt que des femmes, mais malgré mes vingt ans passé, je ne me reconnais pas en elle, surtout quand quelques pages plus loin, elles vantent des crèmes anti-âge, mais elles n'en ont pas d'âge. Etonnant choix, plus étonnante encore notre inconscient et son interprétation naturel, formaté par la publicité ou peut-être lassé par ce vide, ce gouffre entre leur vision et notre réalité.
Moi, je suis blonde, enfin depuis ma première teinture, je me sens mieux ainsi, et plus personne sauf ma mère et mon père se souviennent de ma couleur d'origine. Une petite poitrine, des hanches, un début de cellulite tout en faisant du sport, attention à mes repas, et en bougeant souvent à pied. Bref une personne affreusement générique comme mon copain, qui se décrit ainsi. Ni belle, ni moche, avec des yeux marrons pas en amande, ni un nez de princesse, juste un trait d'eye-liner derrière des lunettes. Standard mais avec son charme, belle avec une petite robe noire, souvent en jupe car mes jambes restent un atout, mais pas un modèle photo. Mais je m'assume avec mon corps, mes hormones et son amour. Celui-ci est si fort, qu'il m'a permis de gommer des doutes, de croire en cette petite robe l'autre jour, de voire la mode plus en féminité.
Mais cette femme, enfin cette jeune femme pour ne pas dire jeune fille sur la publicité des collants, ok elle a des jambes immenses, une taille de guêpe, mais aucune forme sauf celle d'un tube. Je ne suis pas jalouse, juste amusée du décalage entre elle, moi, les autres là devant moi. Aucune lui ressemble !
Et çà ne fait pas rêver pour autant !
NYLONEMENT
texte publié sur le blog
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