Une si longue journée, en se levant tôt ce matin, pour partir à petits pas vers le taxi qui attendait déjà dans la brume d'automne. Lui dormait encore, il réveillerait les enfants pour les accompagner ensuite à l'école, pour reprendre ses dossiers et autres contacts depuis son ordinateur, elle pensait à lui sans entendre les propos du chauffeur, ni même la radio et les infos déprimantes dont se gargarisait le journaliste dès l'aube.
Elle était déjà dans le programme des réunions du jour, à l'autre bout de la France, après cet avion, avec un déjeuner clients en plus, des équipes qui voulaient toujours plus, des commandes en attente pour la fin d'année. La pression naturelle montait, mais elle maîtrisait ce stress positif qui lui avait permis de fonder sa PME. Maintenant déployée dans chaque région, avec chaque équipe est surveillait les ventes, le marketing, les nouveaux arrivants, les futurs produits en développement, les finances et toutes les obligations légales d'un monde en pleine évolution. L'humain était un vecteur sur lequel elle voulait s'appuyer pour impliquer toujours plus ses collaborateurs, les premiers arrivés comme les plus récents. La même stratégie même si les premiers banquiers n'avaient rien compris à son projet, ni même à ses tableaux et autres plans d'évolution de croissance très maîtrisée. Ils ne voyaient ni les leviers, ni les risques et encore moins le réel besoin de financement progressif pour qu'elle puisse contenir les paliers d'évolution tant en France qu'ensuite en Europe ou ailleurs. Leurs vieux schémas, elle en avait parlé pas plus tard que la semaine dernière dans un congrès de jeunes entrepreneures, démontrant la frilosité de certains, mais surtout leur incapacité à prendre des risques alors qu'ils faisaient payer si chers leurs services. En point final à une question de la salle, elle avait ajouté l'incroyable médiocrité de projection dans l'innovation des soit-disant conseillers. Le banquier, sponsor partiel de l’événement avait serré les dents mais avait vu en elle une ambition confortée d'un pragmatisme bien réel, bien actuel. Elle en riait en pensant à tout cela, en validant son passage avant l'embarquement.
Une petit heure pour travailler des documents, pour préparer des emails pour ici et là, interne ou externe, pour se satisfaire aussi des nouvelles gammes présentées pour les cadeaux de fin d'année. Descente, téléphone rallumé dans l'autre aéroport, elle s'avançait vers sa collègue, les responsable commerciale de Toulouse, partageant sur son hésitation entre robe ou pantalon, en cet automne mitigé, recevant un compliment pour sa veste blanche kimono si élégante.
Discussions dans les embouteillages avant d'arriver au bureau, elles croisaient des informations diverses sur les dernières commandes, sur les attentes des boutiques et sur l'enthousiasme de chacun. Réunions, avec des questions et surtout des réponses limitées dans le temps, des points d'avancement, des décisions et d'autres questions en suspens avec un responsable pour établir un diagnostic. Réunions encore, déjeuner dans un restaurant élégant, avec l'idée originale de partager des tartes salées diverses, des soupes confectionnées sur place, du frais et du local. Un petit vin rouge local aussi, en riant entre deux phrases, les échanges étaient positifs. Réunions encore avant de repartir vers l'aéroport tout en répondant au SMS des autres équipes, les amies et le super papa.
Ce soir, il serait là, les enfants entre les mains d'une baby-sitter voisine, ils iraient au restaurant. D'ailleurs elle avait une jupe fluide en jersey gris foncé, pailleté avec subtilité pour remplacer ce pantalon noir. Ses jambes seraient un bel argument de plus dans sa journée de femme. Juste le temps de se changer en vol, un voile fin de nylon pour les envelopper, avec des talons hauts pour combler son bonheur, pour elle, pour lui.
Nylonement