Après un soirée entre amis et leurs amis, des altermondialistes avec des idées remplissant leurs bonnets en laine sud-amérciaine, des propos intégristes sur tout, et finalement goinfres de toutes les cochonneries industrielles qui recouvraient le buffet. Après leurs rêves, et la réalité plus basique de leurs vies, leurs snobismes plus que leurs idéalismes, leurs paroles et beaucoup de bons vins de notre cave, notre apport à cette soirée, les langues ont parlé vrai, ont dévalé les pentes du capitalisme, pour rouler sur une véritable anarchie, sur des caprices plus que des priorités pour nourrir les autres mais surtout pour remplir leurs assiettes de spécialités italiennes, ramenées par un autre couple, sûrement pas en vélo, comme ce chorizo délicieux venant de la vallée de la Douro avec le porto délicieux.
Paradoxes et reflets flous de leurs discours, j'ai préféré boire que de leur dire de fermer leurs gueules, d'arrêter le monopole de la pensée unique et bien-pensante alors qu'ils sont incapables de faire pousser trois tomates, et encore moins des patates pour vivre leur auto-suffisance proclamée, loin des supermarchés. Et puis ce que l'on perd ici dans nos poubelles n'a jamais servi ailleurs, la goutte d'eau qui coule en trop ici, ne sera jamais disponible dans le sahara.
Je me lève, je bois encore, je ris à leurs conneries stériles, et n'en pouvant plus, j'ouvre sur la table basse leurs besaces en poils de vaches mongoles. Etrangement tombent des ipad, des imachines, des téléphones qui nourriraient plusieurs familles ici ou ailleurs, je hurle mon bonheur en montant sur la table, en rigolant avec ma bouteille à la main, mes talons sur leurs bordels et leurs précipitations à tout récupérer. Pas la peur de du gâchis, non juste leurs peurs mêlées de voir leur confort exposé, loin de leurs flux de mots bien-pensants, les alter-machins ravelent leurs salives. Et moi, je saute à pieds joints dans la flaque de leur bêtise. Certes mes chaussures à semelles rouges déparent mais j'aime la mode, fabriquée ici, chinée là, achetée dans les petits commerces comme dans le luxe. Je picore ma mode, mes folies et mes envies sans retenue. Ais-je raison ? je m'en fous, je parcours mon monde, celui de mon bureau, de mon salaire, de mes jours de RTT, de mes vacances, de mes courses, de mon insouciance, de ma vie de trentenaire heureuse et légère. Frivole je suis, peut-être ! Changeante et heureuse, oui !
Les amis rient, on est tous un peu bourrés, les rêves continuent, les emmerdeurs ont quitté la place, on picole encore, on chante, on danse sur des musiques africaines, américaines, d'ici et d'ailleurs, la mondialisation est culturelle. Le système, on ne peut le changer, on le subit, sauf si un jour on devient maître du monde, mais aucun candidat ici, juste des délires, des vieilles histoires de notre jeunesse commune avec quelques vieux amis. On parle de robes, de ballerines et de bottes, avec ce printemps pluvieux, de tops et de sacs à mains. Plus de discours sur la composition, sur la provenance, sur les conditions de fabrication, d'ailleurs je n'en sais rien, j'ai juste aimé le style, les paillettes, les couleurs. Saoûle, je suis rentrée sur l'épaule de mon compagnon, on a marché jusqu'au taxi, pour traverser la ville. Les escaliers m'ont paru immenses, j'ai abandonné les talons pour les dernières marches, et je me suis écroulée dans notre canapé dans le silence de la nuit. Saoûle, heureuse.
Ce matin, aucun remord, juste un bon mal de tête. Je vais marcher pour aller au boulot, l'air frais me fera du bien, une pharmacie, quelques comprimés, des vitrines, des chaussures, encore des chaussures, des petites jupes, des ensembles, de la mode, un médicament, un peu de bien-être, ma vie.
Nylonement