Heureux hasard en déménageant enfin de ce nouvel appartement, m'installant avec ce beau gosse que je fréquente depuis plus de trois ans, je récupère des cartons dans la cave de ma mère. Des livres et des babioles, des trucs de jeune femme qui fût jeune fille encore avant, mais qui semblent loin de moi maintenant. Je ris des carnets de note, des cahiers de poésie avec mes dessins improbables pour illustrer les plus grands poèmes.
Et puis des ouvrages, des livres et des bouquins, de tout, car toujours j'ai lu un peu de tout, curieuse avec des manies, mais ouverte à tant de bons auteurs, comme à ceux qui ne firent rien de mieux que de me trouver pour unique lectrice. Mais cette couverture-là me rappelle instantanément le contenu, les mots, les pauses et surtout la question primaire de l'auteur, plus encore de son héros trentenaire, suis-je obligé de faire un enfant avec elle ?
Pendant près de trois cent pages, denses et poétiques, le bonhomme cherche un sens dans le regard et dans l'appétit de ses rencontres. Beau, tranquille et sans réel défaut, il attire les jeunes femmes, moins jeunes aussi, qui l'aiment parfosi réellement, d'autres pour un soir, pour jouir avec lui, dans son appartement, avec une terrasse, tiens je me souviens de ce détail insolite. Mais lui, non seulement il ne veut pas faire l'amour pour simplement du cul, il aime, il apprécie les fantaisies, mais peu les histoires courtes, il ne couche pas le premier soir, il prend son temps, déguste la femme. Et au fil de l'histoire, il n 'a qu'un défaut, la peur folle d'être père, malgré lui, malgré le préservatif, malgré sa non-envie, malgré ses refus. Il part, parfois s'enfuit loin de sa conquête, et jamais n'arrive à plaire à sa mère. Oui, il ne fait pas de petits enfants comme ses soeurs et ses frères, est-il homosexuel ? la question vient pour nous faire rire, mais on lit son angoisse de ne pas vouloir être père, car il n'en ressent ni l'envie, ni le besoin. Aucun manque, aucune frustration aux naissances des copains et copines, mais aussi aucune projection dans les bambins, dans les neveux et nièces, petits ou grands, rien de commun avec ces progénitures nombreuses. Même pas par égoisme !
J'adore ce livre, je vais le relire, je trie encore mais je pense aussi à mes soeurs, à mes copines, et finalement à moi, le version féminine de ce héros. Là maintenant, un bon boulot, un mec, des hormones du désir, du sport et d'autres activités, des week-ends en amoureux, du sexe, mais pas du tout d'envie de bébé. Aucune ! Jamais avant, pas plus maintenant, même après avoir vu le regard gourmand de mon homme sur les ventres ronds de mes soeurs, ou tenant les jumelles d'une amie. Absolument rien.
Ce n'est pas mon truc, et j'ai expliqué à ma mère, que non, ce n'est pas un problème de fertilité, ni de manque de sexualité. J'ai pas envie de bébé.
Et même mon chef en me proposant ce nouveau poste, ce nouveau gros projet, dans des mots incertains et malvenus, lui aussi m'a prévenu d'une maternité possible "à votre âge, ce serait logique..." Qu'est que la logique dans tout cela ? un réflexe primaire de la femelle reproductrice ?
Je ne veux pas de bébé, mais je reprendrais volontiers du dessert, quand la question vient entre amis, je mange, je mange encore. Marre de justifier ce qui n'est qu'une décision, mais surtout une non-envie, et aussi une non-oblogation, enfin il me semble. Ainsi va ma vie.
Nylonement