Je passais dans ce coin de quartier de bureaux, après avoir tourné un certain temps pour trouver un parking, merci à ces architectes qui ne concoivent la ville qu'avec des transports en commun, mais sans le service de tranport assuré aux heures où les cadres continuent de travailler, un peu tard parfois. Prévoyant la longueur de ma journée, j'avais pris ma voiture.
Je marchais maintenant vers cette adresse, cet immeuble, au milieu des autres hauteurs, très impersonnelles, avec un sombre coin de ciel gris, celui de l'automne, ici tout le monde courait, après quoi, je n'ai jamais su, malgré de nombreuses années de philosophie de trottoir, étant une particule de cette masse qui court sans savoir.
Puis je l'ai croisé, là juste en face de moi, en levant la tête, elle était assise devant un bar. Deux tables, quatre chaises, une femme. Le temps a ralenti, totalement, elle contemplait le massif de plantes posé derrière la terrasse, un des rares endroits vivants, et presque naturels du lieu. Elle prenait son temps, cela se voyait, elle n'avait ni BBP, ni Imachin à l'oreille, ou dans les doigts ou même sur sa table. Elle savourait le lieu, avec toutes les odeurs, les passantes, les mouvements, et même les bruits des uns et des autres.
Soudainement il y avait deux mondes, presque parallèles, dans une dimension de temps distinct, avec le bonheur de son regard un peu parti, elle rêvait peut-être aussi d'un ailleurs plus verdoyant, d'un bureau proche d'une forêt, des oiseaux, des personnes avec un autre rythme. Elle flânait assise.
Je me suis arrêté, enfin presque car tout arrêt provoque la rebuffade des pressés, des "j'y cours, j'y vole", des fous de la montre, des énervés de la minute de trente secondes. Je me suis écarté ou je me suis fait écarter, je ne sais plus , car je ne regardais qu'elle. Faiblesse d'homme, ou passion insatiable de découvrir d'autres féminités ? Gourmand ou Gourmet ?
Je me suis glissé dans son monde, lent et en suspension, j'ai coupé mon portable après avoir envoyé un message pour signaler un bouchon qui me retardait. Un bouchon immense, avec elle uniquement.
J'ai pu reprendre un peu d'oxygène dans son espace, durant quatre ou cinq minutes, juste pour la voir, juste l'apercevoir. Un tailleur impeccable, juste au-dessus de ses genoux, une chevelure posés sur le début de ses épaules, un soyeux flou et son regard qui parlait. Deux escarpins, dont un en ballade, un brin de nylon clair sur des ongles vernis, une sobriété avec les étincelles de féminité, une femme respendissante.
Elle a soulevé sa tasse, glissé deux pièces dans la coupelle, et s'est levé, je suis reparti avant elle, en voyant ce signal, cette fin de mon espace parallèle. Je suis arrivé dans le grand hall, entre comptoir et hotesses, entre banquettes et plantes vertes. J'ai attendu, et une femme est passé devant moi, c'était elle, avançant vers les ascenseurs, vers les hauteurs.
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Robin Wright par Peter Lindbergh
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et le rayonnement solaire de cette femme
Nylonement