Profitons de tout.
Aujourd'hui, je suis assise sur ce banc, dans un square, certes la route n'est pas loin, les bruits aussi, mais je respire les derniers airs chauds de l'été. Le mois de septembre s'écoule, les jours avec, une parenthèse, un bonus, une drôle de façon de voir les choses peut-être pour vous.
Mais il y a deux ans, j'étais K.O. . Bousculée, j'étais redevenue un foetus fragile, loin de la trentenaire flamboyante, et vînrent les journées entières à vomir, les jours de douleurs, les instants intenses mais sans aucune force. Rien ne m'avait préparé avant, un article dans mes magazines féminins, une page tournée distraitement, des soutien-gorges roses jetés en l'air, des rappels parfois de sujets autour du cancer, mais tout cela c'était pour les autres. Loin de moi, de mes proches, de mes amies. Et dans le tourbillon, en avant, en arrière, vers moi, vers eux, j'avais compris ensuite le silence des fameuses amies, leurs mots qui ne sortaient pas, leurs airs dubitatifs face à ma couleur pâle, à mon envie de les voir sans pouvoir les suivre au restaurant, sans pouvoir communiquer clairement, sans oublier ces mots de "maladie" ou de "malades". Deux années de solitude, avec un mec parti un mois après l'annonce, peut-être avait-il raison de s'avouer inutile, de ne pas savoir m'aimer ainsi, un lâche pour les autres, moi je m'en foutais car j'avais mal, très mal en moi. Et maintenant encore, en rémission annoncée par deux spécialistes, en sécurité et sans douleurs enfin, je repense à cela. Je serai définitivement différente, sans avoir vieillie trop vite, j'ai mûri très certainement.
Je respire, je me gonfle de cet air, de ces arbres aux feuilles rousses, du vert naturel encore présent, des oiseaux, du soleil plus encore. Je gonfle mon reste de poitrine, je vis.
Certes j'ai changé, j'ai vécu d'autres perspectives, sombres au début, lumineuses ensuite. Alors pour ma mode, quand j'ai repris ce boulot à temps partiel, idéal pour résorber ma fatigue hebdomadaire encore présente, j'ai changé là aussi.
Finis les jeans, le confort mou, la silhouette jeune mais sans féminité affirmée, car à l'époque mes petits seins pointaient sous ce pull léger, ce top moulant, suffisait à voguer entre femme anodine et femme simplement casual. Aujourd'hui, plus encore face à l'impossibilité de cette prétention féminine de mon buste, je veux être glamour, je veux être présente, ne plus jouer de mon invisibilité.
Alors j'ai sorti un autre atout, mes jambes. Des talons, une razzia faite avec ma meilleure amie, mon épaule durant ses derniers mois. Des talons hauts, fins, des brides, des escarpins avec ou sans plateforme, mais j'ai pris de la hauteur et puis j'ai opté pour la jupe ou la robe, uniquement, disons principalement. Je montre mes jambes, je ne les exhibe pas, ma mode passe par un regard vertical, vers celles-ci.
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Alors boutiques et e-shops, j'ai dévalisé les unes et les autres, pour remplir mon dressing, je me suis redéfinie ainsi, avec une féminité toutes en jambes, et cela aussi a été un médicament. Surtout quand certains compliments sont passés par là, quand certaines ont reluqué mon collant graphique, ou dernièrement, par un matin frais cet opaque scintillant avec une jupe blanche. Rien, je ne me refuse rien, car c'est un levier pour croquer à nouveau la vie. Je suis jeune, je suis femme et j'espère être bientôt amoureuse et aimée.
Comme je suis.
Nylonement