Pris entre deux courants, un peu perdu sans vraiment être noyé, je regarde ce soleil auquel je ne crois plus pour sa lumière car mon chemin de coeur est ailleurs.
Secoué par des vagues contraires, par les paradoxes d'une vie effilochée durant les derniers mois, sans comprendre totalement ce qui arrive aujourd'hui, et pourtant je savais que cette fatalité était plus que présente. Je n'avais pas envie d'y croire pour eux, pour que la vie s'accompagne d'espoir et d'une vision positive de la maladie. Mais au fond de nous, nous la savions condamnée, nous savions que son départ la libèrerait de ce faux espoir. Unique espérance d'avoir un jour en plus, une semaine, un mois ou un trimestre, mais aussi avec cette souffrance difficile à expliquer aux autres aujourd'hui, cette douleur immonde en elle, dans son regard, derrière son esprit encore vif, voire piquant, derrière cette fatalité acquise mais pas forcément acceptée de la mort imminente.
Mes nuits sont étranges, elles sont comme des vagues de sommeil volontaire et bienveillant. Ce moment où l'en rentrant de trop de boulot, vous vous endormez sur le coin de canapé en totale inconscience de temps et de lieu. Parti ailleurs pour quelques minutes alors que mes nuits sont bousculées de petits détails, de pastilles d'angoisse plus rarement, et de ces allers-retours avec le passé. Pourtant je croyais que notre presque séparation, sans divorce pour mieux gérer la maladie ensemble, en famille, avait mis de la distance dans notre relation perdue. Je le crois toujours, mais il me manque les ponctuations, le point final pour arrêter cette histoire. Et une vague revient encore, ballotant les abysses des souvenirs, mêlant des regrets dans la houle et son écume. Rien ne reste avec les vagues suivantes, juste une nausée, trop de vagues récentes, trop répétitives peut-être.
Les ondes s'enchaînent, l'eau me submerge, les vagues font tanguer mon esprit et pourtant sans résistance aucune, je ne les suis pas vers le sombre, je digère petit à petit cette rengaine humide. Parfois révoltées, se démultipliant dans les courants contraires, elles insistent, me réveillent et perdent alors tous leurs sens quand mon esprit respire avec les yeux ouverts. L'oreiller devient un rocher rassurant, un endroit moelleux pour mieux replonger dans mon univers de rêves.
La vie continue avec de nouvelles échéances et de nouveaux défis. Pas encore assez de temps pour prendre du recul, pour glisser dans cette bulle de douceurs si agréables, partagée de belles émotions et de sentiments d'amour vrai. Digérer ce tumulte sans accepter cette tentation de s'effondrer, si facile, si avenante pour craquer pleinement, à mes yeux inutilement. Mais faut-il toucher le fond, sous les vagues, pour se libérer d'une réalité pesante, pour calmer les eaux ?
Je vais reprendre ici, là et ailleurs, mes mots, mes divagations inutiles et libératrices, mon antidote vers les petits bonheurs. Ecrire pour étaler une digue, lire pour rester plus terrestre que jamais, penser à demain car là est la source de vie. Sagement peut-être ou avec la fougue créatrice du tourbillon des lettres, une autre vague de douceurs.
Nylonement