Ce bouillonnement d'émotions, de fuites en avant dans un tourbillon non contrôlé, si loin de mes habitudes, je subis cela depuis plusieurs jours. Sans réellement comprendre je ne fuis pas la situation, encore moins la crise, je suis dedans, plongé intégralement dans une apnée volontaire pour guider les autres. Collègues perdus et absorbant les peurs, effarés par les messages contradictoires, multiples et surtout ce manque d'objectifs communs, sans managers ou politiques à la hauteur pour donner un sens à tout cela, pour les emmener derrière eux. Alors je deviens ce guide, courageux malgré moi.
Mais derrière moi, après mes longues journées intenses, il y a ce rappel, cette vague, ces vagues, ce roulement continu, cette marée qui chamboule mes nuits, et même en plein jour, les yeux ouverts je perds mes références. Un coup de massue, auquel je croyais être préparé, et pourtant je prend le coup, le premier, les prochains, petits rappels des précédents, funeste augure des suivants. Assommé, je le refuse, je resterai debout même sans mes jambes car je me dois d'avancer. Je ne suis pas le premier à vivre cela, je l'explique aux autres presque chaque jour, mais là, des fibres résistent dans cette déchirure.
ce ne sera pas le Printemps que tu espérais, ce ne sera pas le nôtre pour déposer des gouttes d'eau sur des feuilles. Elles sont là stockées, achetées avec ce bonheur futur de découvrir les inspirations, de les figer ensemble, de partir chacun dans son espace de création.
Quelque chose est cassé.
Et puis cette crise, ce mauvais moment qui me paraît si simple à gérer, voilà que le mal invisible se faufile ici et là, jour de nos peurs. Provocant surtout cette frontière entre nous tous. Ensemble est un mot devenu factice, car nous pouvons être là sans s'approcher les uns des autres, plongés dans un blob gluant et vide, avec des espaces marqués au sol, fixés dans nos esprits. Éloignement, quelques centimètres de trop pour ne plus s'embrasser, pour ne plus se serrer dans les bras, alors que je ne voulais que cela. Une dernière fois avec toi, tant de fis avec lui, encore plus avec eux, et rien. Absolument rien.
Je bois mon thé, fade interprétation du Printemps, plus rien n'a la même saveur.
Tu me manques, ce Printemps là, je n'en voulais pas.
Gentleman W