L'air me semblait irrespirable, saturé d'un manque d'espace ou d'oxygène. Je venais de me lever, de tenter de reprendre pied, mais déjà sur le coin de ce lit, j'avais la nausée. Pas encore debout et déjà assommé, j'avais pourtant poussé le temps au-delà de mon habitude.
Quelques pas, un recoin pour un lavabo, des toilettes, un peu d'air frais de ce printemps déréglé, un ciel gris au-dessus du jardin, j'ai repris une goulée d'air. En vain. Un peu d'eau, et toujours cette nausée, ce moment instable en soi, où le corps pourrait, devrait courir, s'agiter et s'emporter avec tout son poids, mais là je n'avais plus d'énergie, plus de volonté de me mouvoir. Un poids de trop, une force partie ailleurs, un goût amer en bouche. Assommé.
Par quelques grammes de médicaments, par cette piqûre de quelques millisecondes, je chancelais, la vie devait continuer.
Embrumé, je marchais vers la terrasse, pour prendre contact avec l'air, avec la météo et surtout avec cet espace plus grand. Des fleurs de printemps, des pots nombreux, des arbustes, de l'herbe fraîche, des oiseaux picorant et chantant dans ce matin ensoleillé, mais je ne ressentais rien. Une brume intérieur, une zone instable déjà testé, trop longtemps testé car elle avait des effets secondaires. Nébuleux au début, trouble ensuite, négatif dans les relents le plus souvent.
Elle ouvrait les portes d'un inconscient remueur des émotions molles et des sensations mal digérées. Derrière une simple idée, elle collait un reflet gris voire totalement sombre d'un simple ressenti devenant encombrant. Les petits détails s'amplifiaient pour envahir la simple pensée, pour assombrir l'instant de leurs présences anodines. Plus je souhaitais m'échapper, plus j'accumulais des reproches sur mes derniers actes, sur des situations simples devenant encombrantes, bloquantes ou impossibles. Avais-je bien fait ceci ? mon choix était-il juste ? devais encore m'impliquer ici et là face à ce retour si éphémère ? quel décision entre elle et les enfants ? mes actes étaient ils justifiés ? étais-je sur le bon chemin ? tant de questions dans un regard sur les futures pivoines, tant de réponses bloquées derrière des doutes. Certains esprits auraient ajouté un espoir de méditation et donc d'ouverture vers d'autres étapes de l'avenir, moi, je restais bloqué dans cet espace apparemment ouvert, qui me paraissait si étroit. Juste les effets secondaires, les portes ouvertes sur tous les doutes, sur des choix, sur un besoin de respirer, seul, de prendre un peu de recul. Une étrange impression de blesser les autres, quelques soient les actes ou les réponses, comme un partage imparfait, ne donnant jamais satisfaction, aux uns et aux autres.
Refermer les yeux peut-être pour laisser mon corps évacuer ce mal passager.
Attendre.
Patienter sans penser.
Equation impossible, sans échappatoires à cette heure.
Nylonement