L’eau tiède sur mon dos, sa présence tout proche, il se rase en jetant un œil dans le miroir sur sa barbe sous la mousse blanche, sur ma silhouette en reflet. Un grand bonheur que de se réveiller dans ses bras, avec les souvenirs de nos corps imbriqués avant de dormir, de sa chaleur en moi, de son amour toujours présent depuis plus de cinq ans déjà, je suis une nouvelle femme, dans une nouvelle vie. Divorce oublié, enfants plus grands, plus de temps pour vivre pleinement l’amour, pour être aimer, pour l’aimer aussi. Je suis si bien, là quand la serviette me sèche le dos, quand ses mains suivent mes hanches, cherchant les gouttes dans ma cambrure, avec son regard toujours gourmand. Deux bisous il se glisse vers la chambre, je me maquille.
Il revient vers moi, en costume avec sa chemise blanche impeccable, une cravate foncée avec quelques motifs bleus. Encore des bisous avant de partir vers son bus, la porte claque, je file vers la chambre. J’hésite pour ma tenue, la météo change si souvent maintenant avec l’automne, la pluie hier, le soleil demain, mais aujourd’hui reste incertain. Fraîcheur le matin, douceur l’après-midi, je verrai bien un tailleur en tweed clair, une jupe au-dessus du genou, sur le revers caché de mes bas. Une belle lingerie pour mon bien-être personnel, un indispensable de ma féminité. Un chemisier en coton souple, ivoire avec des motifs brodés dans la verticale du boutonnage. La jupe, un zip, mes talons, noirs vernis, mon plaisir, presque mon tic de mode.
Je flâne sur internet, de blog en blog, pour des actualités, des chroniques, des poèmes et des coups de cœur, un menu aussi varié que mon petit déjeuner. Un jus de clémentines, des tranches d’ananas, deux yaourts, un nature, un autre aux fruits, j’hésite pour une tranche de pain grillé ou juste croquer dans les fruits confits d’un cake ramené d’une balade gourmande en amoureux. Ce soir en rentrant avec un thé, avec lui. Dans mes rêves, je vois apparaître ma belle-fille, les yeux lourds d’un sommeil trop court. Les cheveux en bataille, les mots un peu coincés dans sa bouche, elle passe vers la salle de bain, un petit bonjour. Je l’aime bien, nous avons mis du temps à nous connaître, avec les préjugés d’une adolescente d’un côté, les envies probablement égoïstes d’une amoureuse de l’autre. Nous voulions cet homme pour nous, son père, mon compagnon. Mais maintenant ses études l’occupent, ses amours plus encore. Elle est passée dans sa tenue de nuit, un pantalon de pyjama devenu tendance, ce qui parfois me laisse dubitative, ne sachant pas si elle a oublié de s’habiller, de se changer ou simplement si elle sort ainsi peu vêtue, avec cet imprimé sur un coton si léger. J’en ris maintenant. Je pianote sur mon clavier, avec la musique de sa douche en bruit de fond.
Un peu de thé, un yaourt aussi, des mots, mon plaisir du matin. Ses pas légers sur le parquet vers sa chambre, dans mon dos, quelques notes fredonnées en passant, elle est réveillée. Je profite pour arroser les plantes du salon, pour ranger quelques babioles, je suis libre de mes horaires, un privilège de mon activité comme indépendante. Je retouche mon rouge à lèvres, ce détail qu'il aime tant. Même absent, je le fais pour moi principalement, pour mon entourage et bien souvent en pensant à lui. Je me prépare à partir, en regroupant mon tube de rouge à lèvres, ma pochette satinée de bas de secours, mon téléphone et mes clefs, quelques mouchoirs. Elle ressort de sa chambre, elle aussi prête pour sa journée, une autre jeune fille. Plutôt jeune femme d'ailleurs, car bien dans sa génération cocooning avec des gilets, des écharpes et des bottes fourrées en toutes saisons juste pour suivre la tendance, elle a aussi adopté le glamour, du moins la féminité de son époque. Elle resplendit ainsi dans son petit top gris en coton, la bretelle du soutien-gorge noir en dentelle qui dépasse, le décolletté donnant une vue plongeante qui détournera tout étudiant de ses révisions. Sur sa taille est posée une jupe patineuse noire, sobre, doucement ondulée en corolle, sur des cuisses enveloppées d'un collant satiné chair, le tout planté dans des cuissardes en daim noir. Des talons, les cheveux au vent, elle est si mignonne, je lui glise un compliment. Elle sourit tout en me demandant de la déposer, si je peux au rer le plus proche. Ses yeux, les mêmes que ceux de son père, un regard perçant sur la vie.
Nylonement