Journée mitigée, le soleil ne joue pas avec la lune comme dans une chanson joyeuse, mais avec des nuages distants, des brumes surprenantes pour un début d'année. Je patiente pour un rendez-vous, pour convaincre des clients moroses comme le business et la croissance de notre beau pays. La météo serait-elle aussi atteinte par cette contagion ?
Et elles passent, oui deux jambes, une ravissante paire de gambettes dans un gris opaque foncé, des talons en-dessous, une jupe corolle au-dessus. Un rayon de soleil les suivant de près. Impossible, je dois rêver, m'être endormi sur la chaise de cette terrasse, de ce café. Tout est là, un sac glamour et moderne, un petit haut fausse fourrure un peu tendance. Un rayon de beauté, un de ceux qui parle à mon bonheur version mode. Elles s'arrêtent. Je fais une pause sur elles.
Mon heure arrive, un bip de mon téléphone, je paye, je me lève en ramassant mes affaires, je file. Elles sont toujours là, en attente, même le soleil a poussé les nuages malicieux, la lumière juste autour des talons. Je cherche ma direction, justement par là, vers elles. Je traverse, je passe, j'aperçois un visage, une écharpe, le courant d'air qui justifie pleinement cet accessoire.
Ravissante. Ce mot reste en moi. Car dans notre belle société, vous savez celle où vous vivez, payez des impôts inégalitaires, subissant des lois étranges parfois, profitant de la réalité simplement les autres jours, il y a délit de liberté d'expression. Vous en connaissez les tyrans, les barbus châtiant les infidèles, les humoristes et les personnes libres dans un amalgame honteux. Les mêmes, qui inculquent à leurs générations, un héritage crétin (non ce n'est pas une religion !) de mâles en machistes, avec des valeurs viriles et nébuleusement primaires. Ceux-là même qui pense que les femmes sont des êtres humains de catégorie inférieure, mais bien utiles pour le ménage, la gestion des enfants, la cuisine et le lavage de leurs linges. Ces hommes de tous âges, jeunes, enfants, élèves, étudiants, adultes ou vieillards jettent des mots, des saloperies, des insultes, des blessures sur le corps des femmes, mais apparemment ne se lassent pas de les regarder, ou ne savent détourner les yeux ailleurs. Oui ce sont des êtres primaires, n'oublions pas ! Ceux-là toujours qui voyant une femme élégante, belle, jeune ou vieille, libre de sa mode, ceux-là donc qui ne pense qu'avec un cerveau à deux boules, et semblent avoir une sexualité, du moins une vision bestiale, animale (ah moins que ceux-ci ne soient paradoxalement de grands consommateurs de vidéos de cul). Paradoxe de pensées, plutôt de réflexes conditionnés, ils insultent les femmes.
Surtout ils ne les respectent pas. Jamais.
Alors j'assume ma personne, je suis un homme, un mâle, un esthète, parfois probablement un voyeur car je ne baisse rarement les yeux. Machiste, pas du tout, sauf en présence de femmes qui pensent que tous les hommes sont pareils, face aux féministes camionneuses et obtuses, je peux devenir macho extrémiste, le temps d'une joute verbale. Féministe, oui, sensible à la féminité, très sensible à l'équité et à la liberté de vie et d'expression des femmes : OUI !
Je ralentis, elle est derrière moi, je me tourne, elle arrive à ma hauteur se dirigeant vers la même rue, même trottoir. J'ose, une folie dans notre monde actuel, un acte peut-être filmé par les trop nombreuses caméras de soit-disant sécurité. Une liberté cachée, presque un geste militant pour la féminité, j'ose totalement.
"Mademoiselle, je sais que c'est interdit, mais pas insultant, vous êtes ravissante ainsi. Votre tenue défit cette météo. Vos jambes sont magnifiques, votre mode avec."
Dans un même tempo, elle freine, sourit, rit, s'illumine pleinement.
"Merci Monsieur, les compliments sont si rares, les insultes et sifflets trop souvent. Mais j'aime l'hiver, je le défis avec ce rose (sa jupe pour info), même si je dois jongler entre le chaud de mon gilet, de mes collants. Je défends aussi ma liberté de femme, d'être moi, avec la mode que je veux. Bonne journée."
Oui quelle belle journée !
Mots & Emotions
Nylonement
texte publié au printemps sur le blog
www.aboslue-feminite.blogspot.fr