Lumière d'été, ciel entre bleu et gris, la météo joue avec le soleil et les nuages. Une fraîcheur nouvelle, une pause plus légère, moins accablante en température, surtout dans la ville, une nouvelle bouffée d'air, je bois un verre en attendant mon compagnon. Nous sortons ce soir, un anniversaire, une occasion, juste le plaisir toujours souriant de se revoir, de s'aimer, comme au premier jour.
La café s'anime, les couples sortent, des amis se croisent, des solitaires s'ignorent dans un livre ou un journal, pendant que quelques célibataires observent les hommes ou les femmes, en quête d'une personne parfaite, d'un coup de foudre peut-être. Une vieille dame se lève, doucement se faufile vers les tables, pour trouver probablement un lieu d'aisance, non finalement elle s'arrête près de moi.
"Bonjour jeune dame, quel âge avez-vous ?" je reste surprise de sa politesse, de son ton direct, de son regard bleu clair entre deux rides. Plus encore de cette question curieuse pour une inconnue.
"Bonjour, pourquoi cette interrogation ?"
"Je vous regarde depuis votre arrivée. Oui je prends mon thé ici, tous les jours, ou presque, depuis des années. La mode défile devant moi, mes souvenirs avec. Surtout avec une aussi belle robe. Pas de votre époque, il me semble !" avec un sourire malicieux. " Je peux m'asseoir, mes yeux sont plus vifs que mes os."
"Prenez place." sourire en retour "Je suis une une nouvelle trentenaire depuis peu,mais j'aime les belles robes surtout pour sortir. Comme ce soir. Alors j'ai des modèles récents, des petites robes noires, intemporelles, fluides ou strictes, moulantes ou pleines de froufrous. J'ai hérité de cette folie vestimentaire dans ma famille, de mère en fille, de grand-mère en petite-fille aussi. Cette robe a été refaite avec des coupons et un peu de couture récente, mais aussi des mousselines d'antan. Mais je me sens si bien dedans, elle n'a pas d'âge."
"Vous rayonnez de féminité, un soupçon des années 40, 50 même, vous êtes la plus belle de ma journée, voire de la semaine et même de ce mois de juillet, si chaud. J'ai tant vu de touristes, de femmes en short, de sandales plates, des claquettes moches, des tee-shirts informes, des tenues de plage dans la ville. Même pour un café chic, j'avais l'impression d'être dans un fast-food. La mode se perd. Les plus jolies ici sont les avocates du cabinet voisin, des amies avec lesquelles je partage mon thé parfois. Toujours en tailleur, souvent avec de belles chaussures. L'une d'elle s'achète toujours des talons hauts à chaque affaire gagnée, et cette année, elle en change chaque semaine." rire " J'aime voir la mode vivante, pas celle des magazines, des belles et des élégantes comme vous."
"Merci."
"En vous voyant, j'ai même douté, croyant voir une page en noir et blanc, un mirage ou un effet d'un coup de soleil. Je vieillis mais j'avais bien vu, vous étiez là, immobile avec votre sac à main, cherchant un visage, puis entrant dans la salle. Je suis là rarement aussi tard, je ne croise pas forcément les femmes qui sortent le soir, mais je suis heureuse. Je tenais à vous le dire, vous avez avec cette robe, une allure naturellement raffinée. Félicitations." en se levant, elle ajouta " Heureux à notre époque, l'homme qui sera apprécié votre tenue, votre charme complet, de ce chapeau, en passant par votre rouge à lèvres, votre robe, votre étole, vore démarche."
"Merci encore." les joues rouges de bonheur face à ces compliments imprévus, si joliment déposés près de moi, je restais émue.
"Vous avez enchanté ma journée, je vais retourner chez moi, en pensant à cette mode, à mes souvenirs, à cette nostalgie d'antan."
Au loin, il poussait la porte, me faisant signe.
Nylonement
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