Ce matin, en achetant mon magazine féminin habituel, j'ai eu le bonheur encore renouvelé de croiser les pages de publicité où je ne me vois pas, je ne me retrouve pas, je ne rêve pas, rien avec moi. En pourtant je ne suis pas vraiement extraterrestre, plutôt banalement terrienne. Mais ma trentaine arrivant dans quelques semaines, je ne me retrouve pas dans leurs visions de pub et pour la mode, je me pose des questions, pourquoi des mannequins si jeunes, si maigres pour ne pas dire si fines, pour ne pas dire totalement juvéniles et non formés. Moi aussi j'étais comme cela, une saucisse géante qui aimait avec douceur, humour et sourire me rappeler mon statut de hot-do sans tranches de pain. On rigolait bien car effectivement mes tee-shirts de taille douze ans, je les ai mis jusqu'à dix huit ans, fine longue, toutes en jambes, sans vraie taille, sans fesses. Un tube long et une version crop-top pour la mini-longueur des mêmes tee-shirts.
Puis un jour miracle, les seins, un bout de pilule, l'amour, je sais pas un bonnet B orgueilleux pour ne pas dire A, est devenu un bonnet C, mes hanches sont venues se glisser sous une jupe trapèze, mon bonheur avec, ses mains à lui aussi dessus. Des études car avec un bac, diplôme tant sacralisé, on a rien, donc d'autres choix, d'autres doutes quant aux réelles possibilités de boulot en sortant après. Rien de plus. Une féminité qui jonglait entre jean confort et petites robes si agréables mais où l'image dans le miroir était en décalage avec mon moi. Son amour m'a aidé à me comprendre, me rassurer, m'embellir entre crises de doutes et belles émotions.
Et puis les cheveux, les coupes de cheveux, les vieilles photos entre mon adolescence et maintenant. Des couleurs, des longueurs, des versions pas peignées, avec ou sans volume, courtes aussi, en attendant d'être de nouveau longues.
Pas assez ou peut-être trop.
Alors ce matin, les articles sont les préparatifs à des vacances, lesquelles quand on cherche un nouveau boulot après un nième stage avec un bac+5. Des CDD à rallonges, des postes imaginaires, des projets qui capotent et là devant mes yeux, régime pour la plage, cet été. Mais je m'en fous, totalement. J'aime le nutella, oui énormément, là ce soir, là hier, là demain, quand je veux, où je veux, et avec des footings entre copines ensuite. Je croque, je mange pas, je me cherche, je bosse, je bosse pas, je cherche un nouveau boulot, et mon régime il est dans ma tête.
Le meilleur reste dans les petites phrases des responsables RH, une sémantique hilarante digne d'un prochain one-woman-show. "Pas assez de dipômes pour ce poste", "pas le bon", "pas la bonne spécialisation" (mais existe-t-elle vraiment ?), pas le bon mouton à cinq pattes, car deux trop longues, trois inexistantes, et cinq stilettos en attente, franchement je me marre. Car je préfère en rire, sauf les soirs trop lourds, où je pleure, je coupe le net, le téléphone et je pleure. Lui, il bosse, il sèche mes larmes et essaye de trouver d'autres mots. Car la semaine d'avant il m'a entendu raconter d'autres versions : "trop de diplômes", "vous allez vous ennuyer, même si vous voulez ce poste", "vous serez plus qualifier que votre chef, impossible", "trop jeune, enfin pas si jeune car vous avez des diplômes et déjà de l'expérience". Ces cas qui laissent perplexes sur la crédibilité du refus. Trop jeune, trop vieille, trop grosse, trop maigre, trop souriante.
Ah si, j'ai eu aussi une belle remarque "vous êtes très élégante, peut-être un peu trop féminine pour ce type de poste". Je suis restée souriante jusqu'à l'ascenseur, après j'ai hurlé mon bonheur-haine cocktail pour comprendre le réel message. Trop bien habillée ? trop bcbg ? trop anormalement posée sur 7cm de talons ? ou peut-être la jupe crayon, trop glamour ?
Trop féminine, trop féministe, trop femme, trop volontaire ou trop dynamique pour le poste, mais je veux être juger sur mon expérience, mon envie de bosser sur ce projet, mon potentiel à apporter sur les prochaines échéances et pas sur ma jupe. Pour information, ce sont toujours des femmes que je rencontre, donc même un propos que l'on pourrait croire machiste. A moins qu'elles ne soient elles-mêmes héritières de vieux réflexes de management. Non, c'est la crise.
Trop de temps, trop de tout, beaucoup de rien. Ma volonté est là, toujours présente, mais comment expliquer que je ne suis pas assez ceci ou cela, mais que je veux ce poste, ce job, maintenant, car je crois en ma candidature. Même avec trop de diplômes !
Grrrr !
Nylonement
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