Les vitrines sont restées allumées, jour et nuit, pour nous rappeler que dans cette nouvelle prison, nous pouvions encore regarder derrière les vitres. Uniquement derrière cette frontière de verre.
Les boutiques sont closes depuis des semaines, sans ce bonheur simple de pouvoir pousser la porte, pour un bonjour à notre commerçant de quartier, pour savoir s'il va bien, si il a reçu nos produits préférés. Rien, juste ce vide.
Sa boutique est là, immobile, mais en passant devant, j'ai pris le temps, comme par provocation avec même le temps contingenté pour une simple ballade. Je n'avais pas coché la case "en manque de rêve, voire de mode légère". Alors sagement, en allant chercher mon pain, je suis passée, repassée, arrêtée de nouveau devant cette vitrine. Là des corbeilles de dentelle fine, noire sublime comme j'aime le plus souvent pour y glisser ma peau claire, mes seins voluptueux. Mais aussi ces dentelles de couleurs, brodées en bleu sur une mousseline plus neutre, à moins que je ne craque pour cet ensemble en soie rouge avec des fils dorés. Si infiniment féminin. Confortable sûrement car parfois je cède aussi au modèle dont la séduction est la force majeure. J'ai eu le temps d'hésiter plusieurs fois face à cette vitrine, en prenant aussi le temps de rêver de me glisser dans ces nuisettes de soie, de fabrication française, c'est marqué sur la pancarte écrite à la main. Soie fluide, légère et intemporelle pour la douceur qu'elle confère, bordée de motif de dentelle ciselée. Des couleurs là aussi, pour jouer de tout cela sous mes robes. J'aime, pour moi, pour lui aussi, retirer cette robe, ma mode du jour, pour dévoiler cette combinaison de soie pétante de couleurs, pour laisser apercevoir mon ensemble noir, corbeille troublante, culotte envoûtante, jarretelles ensorcelantes de glamour. Voilà que je m'égare simplement avec mes multiples passages devant cette boutique de lingerie. Son univers figé mais toutes les douceurs indispensables à ma vie, à ma féminité.
Aujourd'hui encore j'hésite entre ce string, évanescent mais si peu confortable et ce shorty cachant pour mieux révéler mes courbes. Une gourmandise de plus, dans cette privation inhabituelle depuis des mois, essentiel à mon quotidien, ce petit plus qui me permet de me sentir bien, parfois de ressentir encore plus d'amour, de deviner son regard discret mais pointu pour l'apercevoir dans un décolleté généreux. Oui cela me manque, j'en ai doublement envie. Et puis ce moment intime, complice avec la vendeuse, fière conseillère, connaissant mes goûts mais toujours prête à m'aider à oser autant pour le confort que pour la sensualité des modèles. Je pense à elle, souriante en voyant que la boutique sera ouverte demain. Enfin !
Et ce déshabillé en voile transparent, si je l'essayais, ou ce kimono caché là-bas.
Mirifique écrin de douceurs, je serai là.
Nylonement
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